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5 questions (enfin 6) à Marc Fernandez, auteur du livre "Le nouveau western"

Cofondateur de la revue Alibi et auteur de plusieurs romans noirs à succès, Marc Fernandez s’est lancé un défi pour le moins original : rouler sur les traces du Cid, entre mythe littéraire et véritable histoire ! Rencontre.


© Paolo Bevilacqua


Comment est né ce projet assez fou de faire ce périple sur les routes du Cid ? 960 km, de Burgos à Valence, en 12 jours sur Tornado, votre VTT !


Au départ, c’est une blague avec mon éditrice. Je lui ai proposé de faire le Chemin du Cid, un GR peu connu mais ultra intéressant… à cheval… Puis, la raison l’a emporté et nous avons décidé de partir en VTT. Il a fallu s’entraîner durant plusieurs mois car la route était longue et, j’avoue, ma pratique du sport réduite à quelques parties de tennis. Mais après 6 mois de souffrance (cardio, vélo, muscu), j’ai pu enfourcher le VTT que j’ai en effet baptisé du nom du cheval de Zorro, l’un de mes héros d’enfance.


La vie de Rodrigue est assez différente dans la pièce de Corneille. Qui était vraiment le Cid ?


Rodrigo Díaz de Vivar, c’est son vrai nom a réellement existé. Ici en France on le connaît par la pièce du Cid, mais c’est un véritable personnage historique en Espagne, né au XIe siècle. Un grand combattant, surnommé El Campeador (le champion) car il n’a perdu aucune bataille. Au service du roi catholique Alphonse VI au départ, il est banni suite à une sombre affaire. Il doit quitter le royaume de Castille. Au départ, il pensait se mettre au service d’un autre monarque catholique, mais à Barcelone, où il croit qu’on va l’accueillir, il n’est pas accepté. Il décide alors de mettre son épée au service des seigneurs musulmans. Au fil du temps, sa réputation grandit et il finit par se mettre à son compte quand son armée et sa fortune le lui permettent. Avec un but : devenir le seigneur de la ville de Valence, sa cité rêvée. Il y parviendra après une rude bataille.


Le mythe du Cid est aussi contesté en Espagne car Franco l’a utilisé comme symbole de la Grande Espagne.


Oui, c’est une figure qui a été utilisée par le pouvoir comme symbole de la grande Espagne et de la Reconquête face aux musulmans. Mais en réalité, la vraie reconquête a démarré longtemps après sa mort. Un tel personnage, à l’instar de Jeanne d’Arc en France, a pu servir les manipulations de Franco et, à cause de cela, durant un certain temps, il n’était pas bon de se référer à lui. Heureusement, les choses changent et aujourd’hui, son blason est redoré. Une série télé est même en cours de tournage sur sa vie pour Amazon avec dans son rôle, l’acteur qui joue Denver dans la Casa de Papel !


D’ailleurs, cette aventure est aussi liée à votre histoire, celle de votre famille et à la dictature.


Complètement. J’ai la double nationalité franco-espagnole, mes parents et grands-parents sont espagnols, mes enfants ont aussi la double nationalité. Et les noms de famille de mes grands-parents viennent directement de l’époque du Cid. Une grande partie de ma famille est de Valence et ses alentours, le Chemin du Cid passe par le village natal de ma mère… Tout était réuni pour que j’enfourche un VTT et que j’y aille. Mes grands-parents et mes parents, républicains, ont du fuir l’Espagne et Franco, c’était aussi une manière de leur rendre hommage.


Ce livre est aussi le récit d’un effort physique intense. D’ailleurs, vous ne cachez pas vos difficultés et la fatigue. Comment faisiez-vous pour passer de cet effort physique à l’écriture de ce livre ? Doit-on être sportif (ou avoir été) pour écrire sur le sport ?


C’était en effet un vrai défi physique et littéraire, c’est ce qui m’intéressait et c’est l’objet de la collection Démarches des éditions Paulsen qui ont publié le livre. Un voyage certes, mais avec quelque chose en plus. Je m’attendais à souffrir, mais j’avoue, pas à ce point. J’ai fini blessé, avec une inflammation des mains, et avec 5 kilos de moins. Mais au bout de quelques jours de vraie souffrance, le plaisir a aussi pris le dessus. Le voyage à vélo est assez magique en réalité, on avance à son rythme, on va où on veut, c’est la liberté. Je prenais des notes chaque soir en arrivant dans nos hébergements. Mais à un moment, mes mains me faisant trop souffrir, j’ai arrêté et j’enregistrai mes impressions sur un dictaphone. Je n’avais pas de plan ou d’idée préconçue sur le contenu du livre durant le voyage, je voulais vivre le truc et me laisser porter avant de me plonger dans l’écriture stricte et la structure du livre, qui est venue bien après le retour.

Sinon, pas besoin d’être sportif pour écrire sur le sport à mon sens. Un écrivain, comme un journaliste, peut écrire sur tout. Bien sûr, il a des sujets de prédilection, mais avec un travail de préparation, n’importe quel sujet est possible. Après, concernant le sport, il vaut mieux aimé ça tout de même. J’ai l’impression que ceux qui écrivent sur le sport sont soit sportifs soit fans, mais pas besoin d’en faire pour écrire dessus. Tout dépend de ce qu’on veut écrire aussi…


Pour terminer, parlons football. Pendant ce voyage, vous assistez à la demi-finale retour de Ligue de Champions Liverpool-Barcelone dans un restaurant routier. En 2008, vous avez co-écrit Narco football club, un polar qui se déroule le jour de la finale de la Copa Libertadores entre deux clubs mexicains. Quel est votre rapport au football ? Le football, et plus largement le sport, vous inspire-t-il pour écrire ?


J’adore le foot, j’ai aussi suivi l’actualité de l’Amérique latine durant une dizaine d’années pour Courrier International, c’était une évidence d’écrire ce polar. Surtout que nous étions sur une grosse enquête compliquée à Ciudad Juárez (à la frontière) quand nous avons eu cette idée de roman. Je regarde beaucoup de matchs, j’ai été abonné longtemps au Parc des Princes, en virage, j’ai fait des déplacements de supporters avec le PSG, mon équipe depuis tout jeune et suis fan du Valencia CF en Espagne (plutôt ravi donc de voir le Barça ce soir-là se faire sortir par Liverpool…) J’aime l’ambiance des stades. Quand je partais en reportage en Amérique latine, je me débrouillais souvent pour aller voir des matchs. Quelle ambiance là-bas. J’ai eu la chance de voir un match au Maracana, à River, à Mexico. Je trouve qu’un stade permet aussi de se rendre compte de l’état d’un pays, de sentir la société. Concernant l’inspiration pour écrire, pas plus que cela, même si je ne peux m’empêcher, consciemment ou non, de mettre toujours une référence foot dans mes romans. Dans Mala vida par exemple, mon premier polar en solo, mon héros est supporter de l’Atlético de Madrid et en profite pour lancer quelques pics au rival Real. C’est plus l’auteur qui parle dans ces cas-là que le personnage de roman.

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