Les Demoiselles de Clermont, l’équipe pleine de fraîcheur venue d’une époque révolue

En ligne sur la plateforme multimédia L’Equipe Explore, le nouveau documentaire de Nicolas de Virieu raconte avec justesse les hauts faits du Clermont Université Club. Dans les années 70, l’équipe féminine a marqué le basket européen par ses prouesses et le vent de modernité qu’elle faisait souffler sur la France.

67 matchs remportés sur 88 en Coupe d’Europe, Voici la statistique exceptionnelle des demoiselles de Clermont. Et cela valait bien un film. Dans la nouvelle production de sa plateforme Explore, l’Equipe nous emporte pour une plongée dans l’univers d’une équipe collective féminine légendaire, qu’Ecrire le Sport a eu le plaisir de découvrir en avant-première au siège du média.

Le réalisateur Nicolas de Virieu, auteur d’une dizaine de documentaires consacrés, au parquet, relate cette fois l’épopée du Clermont Université Club, ou « CUC » pour les intimes, la célèbre équipe féminine de basket de la capitale auvergnate. Pour son oeuvre de 58 minutes, le documentariste est allé retrouver les actrices phares de ces multiples championnes de France et finalistes des Coupes d'Europe dans les années 70. Jacky Chazalon, Colette Passemard, Irène Guidotti ou encore Elisabeth Riffiod nous racontent face caméra, en toute intimité, les plus beaux moments sportifs de leur aventure, ainsi que ce que cela voulait dire d’être une sportive en France, il y a 50 ans en terme de précarité et de crédibilité.

En effet, c’est sans doute la plus grande réussite de Nicolas de Virieu dans ce film. En abordant la place des femmes dans notre pays, le réalisateur a su mêler une histoire sportive à son contexte politique et sociétal. Il n’occulte pas le contexte géopolitique particulier d’un sport de haut-niveau en pleine Guerre Froide et la situation des équipes rivales du bloc de l’Est, en tête la grande Uljana Semenova. Au-delà de la performance sportive, sans tout divulguer, on découvre ainsi que ces femmes avaient l’opportunité de faire des choses peu communes pour les homologues de leur époque patriarcale. Cela fait alors moins de 10 ans qu’elles ont le droit de posséder un compte en banque sans attends l’accord de leur mari et encore moins, que l’interruption volontaire de grossesse est légalisée, suite au combat de Simone Veil.

Pour étayer ce contexte politique, Nicolas de Virieu a pu s’appuyer sur des archives riches, qui apportent un vrai plus au visionnage. On découvre les coupures de presse de l’époque, de la presse nationale et locale, mais aussi internationale, puisque même le New York Times, excusez du peu - s’est fait l’écho de leurs prouesses. N’oublions pas la force des images de l’Institut National de l’Audiovisuel (INA) qui retranscrivent avec justesse les performances des joueuses et les moments où les projecteurs furent braquées sur elles. Ce fut enfin particulièrement bien choisi, de la part du réalisateur, de faire appel à Vincent Collet et Boris Diaw pour commenter l’apport de cette équipe dans leur trajectoire et dans l’histoire du basket français. Mettre des voix d’hommes pour parler de femmes, rien de plus fort pour asseoir la légitimité des pratiquantes. C’est que le parcours du Clermont Université Club a apporté une modernisation sur le plan du jeu, par sa contribution technique.

Dans le film, le plus beau symbole de cet effacement du genre et de la transmission entre générations, est la tendresse émouvante que l’on ressent face à la relation entre Boris Diaw et sa mère Elisabeth Riffiod, membre de cette équipe. Avec cette anecdote du maillot, qu’on vous laisse découvrir, on n’a pas peur de l’avouer, Nicolas de Virieu, nous a arraché une petite larme.

Aujourd’hui septuagénaires, certaines filles du CUC se retrouvent encore régulièrement, et continuent de se raconter leurs souvenirs. Même des années après, il y en a encore. « J’en ai la chair de poule, confie Irène Guidotti, nostalgique, à la fin de la projection. On ne peut pas revenir à cette époque ? ».

Assia Hamdi

Pour voir le doc : https://www.lequipe.fr/explore/video/les-demoiselles-de-clermont/20200453