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Le hockey de leur enfance

Une fois n’est pas coutume, aujourd’hui j’ai envie de vous parler littérature jeunesse : Ça, c’est du hockey de David Bouchard (auteur) et Dean Griffiths (illustrateur) aux éditions « Les 400 coups » est un album destiné aux plus de 5 ans.


Dominique et son cousin Etienne nous introduisent dans une partie de « hockey bottine » qui se joue sans patin et sans rondelle mais chaussés de bottines où il s’agit de se disputer une vieille balle rouge. A priori, donc, rien de bien original, si ce n’est, transposés au Canada, les récits des jeux de l’enfance qui, dans l’Hexagone, explorent davantage le football.



Ces jeux auraient donc quelque chose d’universel : dans le coin d’une cour, sur une place ou au fond d’un pré, on met en boule quelques chandails pour marquer des buts et on s’organise en équipes pour se disputer un quelconque projectile… Seule variante (la faute au climat), au Canada, on préfère le hockey au football, Maurice Richard (le « Rocket ») à Zinedine Zidane.


Et pourtant, cet album est incroyablement innovant.


David Bouchard profite de la dimension épicène du prénom d’un de ses personnages (Dominique) pour renverser l’intrigue en toute dernière page. Dean Griffiths joue le jeu avec des illustrations qui montrent toujours Dominique de dos ou attifé d’un bonnet de grosse laine. Et si ce personnage n’était donc pas celui que l’on imagine ?

En effet, Dominique, c’est la cousine d’Etienne qui se passionne pour le hockey. Une fille donc ! Adulte, on se demande comment on a pu passer à côté. Alors, on relit et on traque le moindre indice qu’on aurait laissé filer par une lecture trop rapide : pas le moindre petit participe passé ou adjectif qui porte la trace du féminin, et pourtant, il n’y a pas de faute ! Si d’un point de vue graphique, le bonnet et le « chandail » gomment les traits de la petite fille, la narration choisit de privilégier son appartenance au groupe (avec des sujets pluriels : « on », « nous ») qui permet de dissimuler son identité grâce à la fameuse règle grammaticale « le masculin l’emporte »…


J’espère que l’on ne m’en voudra pas trop d’avoir dévoilé la chute de cette histoire… Mais cet album est une bonne façon d’inviter les enfants à réfléchir sur les stéréotypes de genre dans le monde du sport. Il a le mérite de redonner une place au personnage féminin dans la littérature sportive destinée à la jeunesse en mettant justement en lumière cette absence que l’on ne remarque plus tant elle est devenue habituelle.


En outre, comme le rappelle Benoît Melançon, dans Les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle (2006), l’album reprend (et adapte) le texte le plus célèbre sur le hockey au Canada : «Une abominable feuille d’érable sur la glace» de Roch Carrier (dans Les enfants du bonhomme dans la lune, 1979. Repris sous le titre Le chandail de hockey, 1984). Tous les joueurs y portent déjà le numéro 9 de Maurice Richard, mais ce sont tous des garçons.


Album : dès 5 ans

Première édition en 2004. Mise en page revisitée dans l’édition de 2017.

Dean Griffiths a été nominé au prix Chocolate Lily et au prix SYRCA - Shining Willow en 2004 pour la version anglophone originale de Ça, c’est du hockey ! (That’s Hockey).


David Bouchard et Dean Griffiths. Ça, c’est du hockey, Les 400 coups, 2017.





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