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Marathon littéraire

Dans un texte qui se découpe selon les grandes étapes d’un marathon (échauffement, « dix kilomètres dans les jambes », « les derniers kilomètres »… sans oublier les ravitaillements), Cécile Coulon nous parle d’abord de toutes les courses : la course à pied qui se décline en « footing », « jogging » ou « running ». Pour nous, elle énumère aussi toutes les motivations, ces petits ou ces grands pourquoi de la course : pour la balance, pour la pizza de trop ou le fromage trop gras, pour partager un moment en famille, pour justifier l’achat d’un tee-shirt fluo, ou pour rencontrer la douleur et devenir soi-même. Mais, dans ce Petit éloge du running, c’est surtout du marathon dont il est question. Et là, les kilos superflus ou le renouvellement de la garde-robe ne suffisent pas à justifier l’engagement.


Une première partie historique questionne les origines de la course et semble s’offrir comme une mise en train du lecteur. Ensuite, celui-ci est invité à l’effort, comme happé par la course : si l’auteure concède quelques pauses avec les ravitaillements, la lecture se fait d’une traite. La réflexion est illustrée par de nombreuses références littéraires de Platon à Harry Potter, de Murakami à Huxley. Les images convoquées sont aussi celles du cinéma avec, par exemple, Les Chariots de feu (d’Hugh Hudson, 1981) ou Forest Gump (de Robert Zemeckis, 1994).


Cécile Coulon nous explique aussi en quoi la course permet l’écriture : la course met en branle la « gigantesque boîte à trucs » que constitue la tête. Dans La Montagne (12 mars 2018) puis dans L’Obs (20 mai 2018), Cécile Coulon s’explique :


« Si je ne pouvais plus courir, j’aurais beaucoup de mal à prendre la plume. Quand on court, on ne fait rien d’autre que penser, on trie ses idées, on laisse aller son imaginaire. Après 10, 15 ou 20 km, il reste l’essentiel, la course a dépoussiéré, retiré l’inutile. Il ne me reste plus qu’à écrire ».

« Quand on court un certain nombre de kilomètres, il y a une sorte de tri mental. Ne restent en tête que les choses importantes, qui ont une signification. Courir me permet de défaire des nœuds, de régler des problèmes concernant l'intrigue ou l'écriture. J'arrive alors à écrire cinq-six-sept pages d'affilée. C'est presque jubilatoire. »


Le ton est juste et vivant : ce n’est pas une joggeuse du dimanche qui enfile les baskets pour se donner le droit d’écrire sur le sport, mais c’est bien une écrivaine marathonienne qui a éprouvé la douleur, ni super-héroïne ni déesse, mais elle-même, « parfaitement elle-même, poussée dans ses derniers retranchements ».


Lorsque l’on referme le livre, on a envie d’avoir mal à son tour. De se tester. De voir, par la course, qui on est vraiment. A lire, donc, les baskets aux pieds…

Cécile Coulon, Petit éloge du running. Editons François Bourin, 2018, 128 p.

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