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«Footballeur du dimanche», par Didier Tronchet

Dans sa nouvelle BD, le footballeur-dessinateur Didier Tronchet partage à nouveau son amour du jeu et du ballon. Une lecture drôle et réconfortante.


Didier Tronchet n’est pas un inconnu. Il fait même partie de la famille. Comme un frère, un frère de football. Depuis son «Petit traité de footballistique» (un recueil de textes paru en 2004 chez Albin Michel, réédité en 2010 aux éditions J’ai lu sous le nom «Football mon amour»), on savait déjà de quelle manière il vivait le football. En le lisant et en le relisant, on avait bien pris conscience de l’importance qu’il accordait à ce jeu. Lui-même le résumait ainsi dans un entretien récent à lire sur sofoot.com :

« J’ai une espèce de névrose footballistique qui peut énerver les gens autour de moi, car il n’y a pas d’investissement personnel plus fort pour moi ». Il existe certainement un moment clé dans la vie d’un être humain passionné par ce sport, ce moment où il doit bien se rendre à l’évidence, constatant que le football a pris toute la place. Certains ont alors besoin de l’écrire, d’abord pour tenter de se l’expliquer à eux-mêmes. C’est ce qu’a entrepris Didier Tronchet il y a un peu plus de quinze ans donc, et aujourd’hui il le dessine, avec ce trait, ces couleurs, cet humour caractéristiques qui ont notamment fait le succès de la série Jean-Claude Tergal.



Sa façon d’aimer jouer (n’importe où, par tous les temps, le plus souvent possible), ses souvenirs d’enfance balle aux pieds (seul ou avec les autres), sa relation à l’équipe de France (ces années d’attente à se choisir un autre pays, faute de qualification en coupe du monde !), son but d’anthologie marqué à La Mosson avec l’équipe de la BD (le match a été filmé et l’enregistrement précieusement conservé depuis) ; ces thèmes et quelques autres sont toujours présents dans «Footballeur du dimanche». Cependant l’auteur y parle aussi de choses encore plus graves, comme de sa peur de mourir, c’est-à-dire de sa peur de ne plus pouvoir un jour jouer au football, ce qui est quasiment la même chose. On aime tout dans ces 54 pages, 54 petites histoires, drôles, sincères et tendres, comme autant de façons de partager une passion, de déclarer un amour et de crier que jouer au football est un besoin essentiel. Mais le plus beau, c’est peut-être cette relation qui traverse le livre entre le personnage principal et le ballon. Un ballon omniprésent, tracé à l’ancienne, ses hexagones noirs et blancs ; un objet de désir qui lui aussi a droit à ses bulles, qui à la fin d’une page nous rappelle comme après chaque dispute : « Allez ! On fait la paix ! Tu sais bien que tu peux pas vivre sans moi… ». Le ballon a toujours le dernier mot.


Attention, avant le début de la BD, il ne faut surtout pas oublier de lire, à la toute première page de l’album, l’avant-propos de l’auteur. Un texte qui bouleverse. Où l’auteur explique entre autres que la fin d’un match est un drame dont on se remet toujours difficilement, parce que « dimanche prochain, c’est dans mille ans », que le terrain de football est pour lui « un morceau du ciel tombé sur Terre », qu’un match est « une vie en réduction, mais plus grande, plus forte, plus intense ». C’est sans doute la période, puisqu’actuellement jouer ensemble au football n’est plus si simple, mais cette lecture est un réconfort, elle caresse nos envies de reprendre la vie normale, c’est-à-dire de pouvoir retrouver les autres au stade chaque dimanche de la saison. En espérant que ce soit aussi l’objectif de Didier Tronchet, qui nous fait comprendre en conclusion que la fin est proche, qu’il ne sait pas s’il rejouera, qu’il pourrait décider d’arrêter… à seulement 62 ans ! Un adieu déchirant, impossible, auquel on ne peut pas croire, auquel on ne veut pas croire.


par Valentin Deudon


Didier Tronchet, Footballeur du dimanche, Delcourt, 2021.

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