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Rencontre avec Nelson Monfort et ses "Mémoires olympiques"

Nelson Monfort est un journaliste bien connu des Français notamment des amateurs de patinage artistique et de tennis. Nous l'avons rencontré pour évoquer son dernier livre « Mémoires olympiques ».




Vous avez couvert de nombreux événements sportifs. Est-ce par obligation ou par choix ?

Non, cela n’a jamais été une obligation. J’ai toujours eu la chance de choisir. On ne peut pas être bon partout. Je commente le patinage artistique, je ne me verrai pas faire la même chose avec le rugby. Cela n’aurait pas de sens. Je crois être bien dans ce que je fais, enfin je l’espère. C’est un choix qui se fait mutuellement entre la rédaction et moi-même.


Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre métier ?

Les rencontres. Faire la connaissance des habitants. C’est un métier qui m’a donné l’occasion de voyager, d’être en contact avec des gens d’horizons extrêmement différents. J’ai toujours essayé d’aller vers les gens, de les aimer, et la plupart du temps ils me l’ont toujours très bien rendu. Voilà ce que m’apporte ce métier unique au monde pour moi.


Que trouvez-vous le plus difficile dans le journalisme ?

Ce sont les rivalités malsaines. La concurrence peut engendrer des coups fourrés. La jalousie me semble être un vrai défaut dans ce métier. Mais heureusement pour moi, j’ai de nombreux confrères non envieux et j’ai donc beaucoup d’amis. Mais l’honnêteté me pousse à dire, et je le dis d’autant plus que chacun a ses travers, que je n’ai pas ce défaut. En effet, si un confrère réussit un joli reportage ou une interview, j’ai plutôt tendance à me réjouir pour lui. Je constate que ce n’est pas universellement partagé et j’en souffre beaucoup…


Vous commentez le tennis et le patinage artistique. La grande différence entre les deux c’est qu’au tennis on ne peut compter que sur soi alors qu’au patinage il existe les jurés et leur subjectivité.

Oui, vous avez raison. Le patinage peut être extrêmement difficile non seulement dans son exécution mais comme en plus le résultat dépend aussi des juges, ce sport peut être extrêmement frustrant. C’est une discipline pour laquelle j’ai pas mal d’admiration à cause de toutes ces particularités.


Quelle est la figure que vous préférez ?

Je pense le triple axel car c’est un saut éminemment difficile à réaliser. Et quand il est réussi, il est techniquement parfait. C’est le seul saut qui partant de l’avant possède une forme de poésie en lui.


Est-il vrai qu'après les jeux Olympiques en Chine, vous allez arrêter de commenter le patinage ?

On verra après les championnats du monde à Montpellier au mois de mars.


En tout cas Philippe Candeloro a dit que si vous arrêtiez il arrêterait aussi !

Je peux dire la même chose le concernant. Nous avons effectivement une formidable complicité et je me verrais mal continuer sans lui et apparemment c’est pareil pour lui. C’est peut-être au-delà de la confraternité ce que l’on appelle une vraie et sincère amitié.


Est-elle née tout de suite ?

Non mais assez vite quand même. C’est un garçon en qui j’ai une totale confiance, c’est une belle qualité dans la vie. C’est aussi en tant que journaliste la personne avec qui j’aime le plus travailler…


On vous connait davantage pour le patinage et le tennis, mais je crois que vous aimez particulièrement le golf. C’est un sport qui accompagne ma vie depuis toujours. Je l'ai appris avec mon père et c’est une discipline que j’aime profondément. Aussi bien pour sa pratique que pour son état d’esprit. Quand on joue au golf avec quelqu’un, se met tout de suite en place une forme d’entente et d’amitié basée sur la confiance. Au golf, on ne triche pas. On annonce son score à son partenaire, aucun arbitre n’est présent et tout cela me plaît. Le golf me fait penser si j’ose cette comparaison à certains examens au sein des plus grandes universités américaines qui se déroulent sans surveillance. Cent étudiants sont présents dans la salle sans personne pour les observer. Cela implique que personne ne triche ; cela fait partie de l’éthique du départ. Si une seule personne triche, tout est mis à plat. Outre ces considérations, , j’apprécie aussi le cadre, et les paysages que l’on parcourt sont magnifiques. Un golf de plaine, de montagne, de bord de mer…



Avez-vous joué au tennis ?

Oui et je ne me débrouillais pas trop mal. J'ai été classé 15/5, 15/4. Je pratique le patinage que j’évite dans mon cas d’appeler artistique. Le ski est le premier sport que j’ai pratiqué. Avec les années qui passent je n’en fais plus de 10h à 17h mais j’aime beaucoup dévaler les pistes avec un ou deux amis hors des sentiers battus.


Avez-vous assisté à la 21ème victoire de Rafael Nadal en grand Chelem à l’Open d’Australie contre Medvedev ?

Oui. Il était mené deux sets à rien, 3/2 et 0/40 sur son service ! J'ai vu un certain nombre de grands matchs dans ma vie, mais c'est l'un des plus grands auquel j’ai assisté. Je ne veux pas employer de trop grands mots mais c’était tout simplement extraordinaire.


Vous avez des relations assez privilégiées avec lui. Un jour, il vous a dit que contrairement à beaucoup de journalistes, il ne vous faisait pas peur !

C’est exact. Je ne vais pas dire que c’est un ami, on ne se tape pas dans le dos mais j’ai une totale estime pour lui, et je pense qu’il me le rend bien. J’ai animé deux fois sa soirée caritative et c’est un garçon que j’aime énormément.


L'exploit de Nadal me fait penser à cette phrase de Mark Twain que vous citez au début du livre : « Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait !"

C’est une phrase qui je l’espère accompagne ma vie. J’aurais pu en mettre une autre « Oser c’est se perdre un instant, ne pas oser c’est se perdre soi-même. » J’aime ces citations. Je n’en ai pas cinquante dans la tête, mais certaines me suivent sur mon chemin de vie.


Dans votre livre vous parlez d’une grande estime que vous avez pour Pierre de Coubertin. Sa misogynie ne vous dérange pas ?

Nous ne sommes pas en 2022 mais en 1900. Il faut se remettre dans le contexte de l’époque. Évidemment il fait preuve d’une grande misogynie vis-à-vis des sportives et ce serait insupportable à entendre aujourd’hui. Mais encore une fois, il faut comprendre que l’on est très loin de la génération actuelle..


Vous pensez comme lui que l’important c’est de participer ?

Quitte à paraître démodé, je pense effectivement que l’important en sport c’est le fair-play. Et le fair-play passe avant tout par la participation et non pas par le fait de gagner à tout prix. Je le pense vraiment.


Vous citez Pierre de Coubertin comme un intellectuel qui en dehors du sport s’intéressait à de nombreux domaines. Aimeriez-vous que les JO englobent comme autrefois davantage d’événements artistiques ?

Oui. Au début, les JO ne comprenaient pas uniquement des épreuves sportives et il me semble que se déroulaient par exemple des épreuves d’ échecs, de bridge. Cela serait intéressant de revenir à cette ancienne formule. Cela me paraît complètement impossible et J'ai vraiment le sentiment d’être vraiment d’un autre monde en disant cela. Les JO ont atteint aujourd’hui un gigantisme terrible et je trouve qu’il serait bien qu’il y ait une forme de retour aux sources avec des JO organisés à Athènes l’été et en hiver à Chamonix. Ceci de façon régulière.


Poursuivons sur les JO. Vous déplorez le fait que certains sports ne soient pas assez mis en valeur.

Pour moi, le disque est la discipline olympique par excellence. Sur les anciennes gravures olympiques que voit-on ? Le lancer du disque. Or il passe un peu au second plan et je trouve qu’il existe presque une forme d’injustice. Un sport comme l’athlétisme est tellement riche. Il y a tout, le saut, le lancer, le relais et c’est tout à fait merveilleux pour moi. J’aime en particulier le relais 4 fois 100 m.


Et d'autres n'ont pas leur place...

Oui le football et le tennis sont des sports hyper bien organisés et hyper professionnels qui n’ont pas besoin des JO pour exister. En revanche l’athlétisme, la natation, le ski en hiver, le patinage, l’aviron, le canoe kayak , l’haltérophilie, le judo, le karaté, le curling, le biathlon bien sûr. Même le golf qui est pourtant un sport que j’adore n’a pas vraiment sa place aux JO.


Revenons à votre métier de journaliste. Vous dites qu’en direct vous avez encore un peu le trac !

C’est une forme de respect du public. On n’arrive pas devant des millions de spectateurs les mains dans les poches, sans avoir rien préparé. Ce respect me procure non pas un trac paralysant mais un trac qui fait que je suis concentré. C’est peut-être ce qui m’a permis enfin j’espère, de faire un assez bon bout de chemin en matière de sport à la télévision.


Même vis-à-vis des athlètes vous avez une petite gêne à être souvent le premier à les interviewer juste après leur compétition !

Je dirais que j’ai une forme de pudeur, ce qui est plutôt quelque chose de bien…


Vous parlez de vous comme d'un journaliste plutôt consolateur contrairement à beaucoup de vos confrères qui sont durs et ne laissent pas les athlètes savourer le moment présent.

Oui c’est tout à fait exact. A certains moments, je sors un peu de mon rôle de journaliste et j’essaye d’être un passeur d’émotion. Se réjouir de la victoire c’est assez facile, mais compatir en cas de défaite c’est plus difficile. Il faut adopter le ton juste et j’essaye de le faire.


Parfois votre désir de faire bien a été mal pris. Je pense à votre interview avec l’athlète Ophélie Cyrielle Etienne qui venait de perdre sa mère.

Oui, extrêmement mal pris. Je souhaitais qu’elle dédie sa victoire à sa maman qui venait de la quitter. Pour moi c’était un sentiment noble qui a été mal pris mais ça ne veut pas dire qu’il existait une intention maligne derrière. C’est le propre des réseaux sociaux que j’appelle souvent des fléaux sociaux. N’importe quelle petite chose prend des proportions hors de propos. Je suis contre une certaine utilisation de ces réseaux.


Pour terminer, dans votre livre vous affirmez que les événements du passé, ceux auxquels nous n'avons pas assistés, font davantage rêver que ceux du présent !

Oui c’est ce que j’essaye de développer dans mon livre : la capacité d’imagination. Celle-ci est évidemment bien plus développée pour des événements auxquels on n’a pas assistés. Quand je parle des JO de 1924, des premiers jeux d’Athènes en 1896 ou ceux de Los Angeles en 1932, j’imagine plus fortement l’événement et je souscris à cette réalité. C’est pour cela que je ne suis pas un grand fan des caméras qui vont dans les vestiaires ou autres. Il faut savoir garder un côté un peu mystérieux. C’est cela qui fait rêver le public et qui me fait rêver. C’est la même chose pour un artiste, un réalisateur qui doit donner ce qu’il existe de meilleur dans sa discipline. Mais essayer de faire copain copain avec lui, je ne pense pas que ce soit une bonne chose. Il faut mieux rester sur cette part de rêve.



Propos recueillis par Agnès Figueras-Lenattier







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